Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes âgés de 12 à 19 ans décident de se retirer de la vie sociale pendant de longues périodes, en s’enfermant chez eux, sans contact direct avec le monde extérieur, parfois même pas avec leurs parents. Ils commencent ainsi à troquer le jour pour la nuit, à abandonner leurs études, à négliger leurs amitiés, jusqu’à déclencher un véritable « syndrome de retrait social » : le terme japonais Hikikomori – qui signifie littéralement « rester à l’écart » – est utilisé dans le jargon pour désigner ces jeunes qui vivent chez eux prisonniers d’eux-mêmes, de leur anxiété ou de leur dépression. Nous abordons ce sujet délicat avec Michele Miccoli, avocat pénaliste, professeur titulaire de droit pénal à l’Université internationale de Milan, président national des sociologues italiens associés, auteur de nombreuses publications universitaires et de plusieurs livres, dont « Hikikomori. Il nuovo male del secolo’ (publié en 2018 par Lupetti editore), dans lequel l’auteur met en lumière un phénomène qui se répand malheureusement comme une traînée de poudre et qui, précisément pour cette raison, appelle à une réflexion approfondie.
par Roberta Imbimbo
Miccoli, qui sont les Hikikomori ?
Le Hikikomori est un malaise psychique juvénile complexe caractérisé par un refus de la vie sociale, scolaire ou professionnelle pendant une période prolongée, d’au moins 6 mois, et par conséquent, par un manque de relations intimes à l’exception de celles avec les parents proches.Le phénomène, qui concerne aujourd’hui 120 000 jeunes en Italie, prend des dimensions inquiétantes, même si les ressources allouées par notre pays à la psychiatrie à l’ère du développement sont très limitées.L’auto-isolement est aujourd’hui la deuxième cause de suicide chez les jeunes et la première cause des actes d’automutilation, qui visent à endommager volontairement son propre corps, pas toujours nécessairement dans un but suicidaire.
Il s’agit donc d’un problème très grave qui, malheureusement, s’est multiplié de manière exponentielle depuis Covid : avant la pandémie, en effet, les hospitalisations pour automutilation représentaient environ 25-30% des cas, contre 65-70% aujourd’hui. Les dernières données fournies par la Fédération italienne des pédiatres font également état d’une augmentation de 75 % des tentatives de suicide au cours des deux dernières années. Chaque jour en Italie, un adolescent tente de mettre fin à ses jours. Et 150 000 jeunes vivent isolés, sans aucune interaction sociale avec le reste du monde. Face à ces chiffres alarmants, les demandes de consultation neuropsychiatrique, même en cas d’urgence, ont été multipliées par 40.
Comment reconnaître un Hikikomori ? Quels sont les symptômes qui doivent inquiéter les parents ?
Les hikikomori font l’expérience de l’exclusion sociale en s’isolant.La réticence à sortir de chez soi peut avoir plusieurs causes, notamment la dépression clinique, la phobie sociale ou les troubles anxieux.L’addiction aux réseaux sociaux a également été largement associée au syndrome, car les jeunes Hikikomori finissent par les utiliser comme leur seul moyen de communication et d’interaction.
Les adolescents choisissent de se retirer radicalement de la vie réelle, abandonnant le circuit relationnel naturel pour se consacrer exclusivement au monde virtuel. Il s’agit d’un monde créé artificiellement pour éviter encore plus le contact humain, aggravant ainsi l’état de la pathologie et donnant le sentiment illusoire d’avoir échappé à la peur des relations sociales réelles. Mais il peut aussi y avoir d’autres causes : brimades, accablement, attentes élevées de la part de la famille. L’école est le premier lieu qui peut nous aider à identifier les premières sonnettes d’alarme, car c’est l’endroit où le jeune peut être le plus exposé aux brimades et à la pression sociale. Mais pas seulement. Les jeunes peuvent craindre de décevoir les attentes élevées de leur famille et de ne pas pouvoir faire face à la pression sociale et à la confrontation avec le monde extérieur. Le sentiment d’échec permanent, en ne parvenant pas à atteindre les normes souhaitées, peut entraîner une perte d’intérêt pour la vie, une inversion du rythme veille-sommeil, des sentiments intenses d’anxiété, de dépression, de panique qui conduisent le jeune à abandonner ses études (malgré, dans la plupart des cas, des résultats scolaires extrêmement élevés), le sport, ses amitiés, et à s’isoler dans sa chambre, qui devient ainsi un refuge sûr contre le monde extérieur.
Comment gérer un cas d’Hikikomori ?
Puisqu’il s’agit d’une véritable addiction en tant que telle, il convient de l’aborder de manière thérapeutique, en essayant de détecter rapidement les premiers signes de malaise, en ne sous-estimant pas les demandes d’aide des enfants en difficulté, en ne vivant pas cette pathologie comme une honte ou un échec de son propre enfant, mais en favorisant au contraire les moments d’écoute, de dialogue et en encourageant les possibilités de relations, notamment avec les pairs.Bien que le fait d’avoir un enfant Hikikomori soit un défi difficile à relever pour de nombreux parents, il est conseillé de demander l’aide d’un spécialiste qualifié qui pourra lentement sortir l’enfant de ce tourbillon dangereux et le réintégrer dans le tissu social, d’une manière plus harmonieuse et moins conflictuelle.